L’heure des présentations a sonné !
Ah, les formalités du premier jour d’école…
C’est sans doute le moment le plus long de cette journée. Enfin, il faut quand même bien ça pour les petits nouveaux qui n’ont pas encore leurs repères dans cette jungle de nouveautés.
Je vais donc vous épargner encore une fois les moments un peu trop longuets pour en venir à l’essentiel de cet après-midi, les présentations individuelles des élèves.
“Fujisaki-sensei, je pense que c’est le bon moment pour faire les présentations.”
“Oui, vous avez raison. Il ne faut pas que l’on s’attarde plus sur les formalités sinon nous risquons de nous faire interrompre par la sonnerie.”
La professeure principale se retourne vers les étudiants et s’exclame.
“Nous allons passer à la partie que vous attendez tous je l’imagine, les présentations personnelles. Exprimez-vous clairement et ne soyez pas timide, d’accord ?”
“Allons allons, Fujisaki-sensei, vous ne pouvez pas leur dire ça comme ça. Pensez à ceux qui ne sont pas à l’aise… Faites comme vous le sentez, si vous voulez juste dire votre nom et prénom, ce n’est pas un problème.”
“Faisons comme ça alors… Bon, qui veut commencer ?”
Aucune réponse, aucun geste, aucun bruit n’émane de la classe.
C’est toujours le moment le plus délicat, le premier à passer sert de crash test pour les autres, qui sera donc la première “victime”.
“Personne ?”
“Bon, puisque que le premier pas est toujours le plus dur à réaliser, il est de mon devoir en tant qu’ancien vice-président du BDE d’ouvrir le bal.”
Au fond de la classe, Ooshima-kun se lève pour prendre la parole.
Son intervention sonne comme un glas de libération pour les autres élèves indécis de la classe.
Il prend une pose digne d’un mannequin faisant une pub pour du parfum ou un shampoing et avec un petit air prétentieux, presque trop sûr de lui, il prend l’initiative.
“Ooshima-kun ? Très bien on commence par toi. Préparez vous les autres parce que nous allons faire par colonne, donc Aimura-kun, tu es le prochain.”
“Eh ?”
“Pas de Eh qui tienne. J’ai l’impression que celà va nous prendre une éternité si j’attend que tout le monde se décide. Donc je t’en prie, commence Ooshima-kun.”
“J’imagine que vous me connaissez tous pour la majorité si vous avez déjà été étudiant à Kumiai l’année dernière…”
Il regarde de travers Rina sur sa droite avec insistance.
“… ou si vous avez suivi mon discours de ce matin…”
Rina se sentant visée par cette petite pique assène un coup de coude furtif dans la hanche du malheureux.
Il perd un peu l’équilibre et se redresse directement en se dandinant étrangement.
Les autres le regardent ondulé comme une algue sans comprendre la raison.
“Un problème Ooshima-kun ? Qu’est ce qu’il t’arrive tout d’un coup ?”
“Ah… haha, non ce n’est rien, je pensais juste que j’avais besoin de faire un petit peu d’exercice pour les hanches. Je suis resté trop longtemps assis je commence à avoir mal aux fesses.”
Tout le monde explose de rire.
Ooshima en profite pour dire discrètement à Rina
“Tu m’as fait super mal. Ton coude est venu se loger directement dans le nerf de ma cuisse.”
Grand sourire fourbe de la responsable.
“C’était pas voulu mais bien fait pour toi.”
“Je comprends que tu aies besoin d’exercice mais tu feras ça plus tard, ok ?”
“Oui, bien sûr, haha. Alors comme je disais, je suis Ooshima Minato, j’ai 17 ans, ex-vice-président du BDE et actuellement votre nouveau camarade de classe pour l’année à venir. Je suis membre du club de théâtre, si vous voulez m’inviter à manger, sachez que je raffole des Linguines au saumon et mon cours préféré est celui de Miss Fuji-”
*Bruit de sifflement*
Et encore une fois…
*BAM !*
Une nouvelle craie fût tirée. L’impact cloue littéralement Ooshima sur sa chaise sans qu’il ne puisse finir sa phrase.
“Très bien merci de ta présentation, tu peux te rasseoir gentiment. Aimura-kun, c’est à toi.”
Le garçon se lève précipitamment, faisant presque renverser sa table et sa chaise.
“AH ! Désolé…”
“Je sais que tu n’es pas très à l’aise Aimura-kun, alors fais comme tu le sens.”
Les yeux du garçon tournent dans tous les sens, comme s’il sortait d’une centrifugeuse.
Quelques élèves l’encouragent à voix basse.
“Tu peux le faire Aimura.”
“T’inquiètes pas, on est là.”
Il reprend ses esprits, regarde droit devant lui et fixe le tableau sans détourner le regard.
“Je… Je suis Aimura Hodaka, j’ai 16 ans… J’espère passer une bonne année avec vous merci.”
À peine a-t-il le temps de finir sa phrase qu’il s’assoie directement sans faire de bruit tout en cachant son visage avec ses mains.
“Bien joué Aimura.”
“Tu l’as fait Hodaka-kun.”
Sa timidité semble être maladive, mais au moins on dirait qu’il a quand même quelques amis pour le soutenir pendant ces moments là.
Onigawara-sensei se penche vers Fujisaki-sensei pour lui poser une question, il lui chuchote à l’oreille.
“Aimura-kun a un problème particulier ?”
“Hum, disons simplement qu’il a une sorte de phobie sociale. Il a énormément de mal à se relaxer quand il y a du monde autour de lui et encore plus quand l’attention est concentrée sur lui.”
“Hein ? Mais alors pourquoi participe-t-il aux présentations ? S’il est si mal à l’aise, on peut faire une exception pour lui non ?”
“Je lui aurai bien entendu permis de faire ainsi mais c’est lui même qui a demandé à participer à cette animation.”
“Comment ça ?”
“Il a tout à fait conscience de son problème et fait beaucoup d’effort pour se soigner de cette phobie. C’est un garçon très intelligent et déterminé, je ne pouvais pas me permettre de le freiner dans sa démarche.”
“Votre sagesse m’impressionne… Vous montez dans mon estime Fujisaki-sensei, et Aimura-kun aussi, j’en ai presque la larme à l’oeil.”
“Gardez vos sentiments pour plus tard, il reste encore beaucoup d’élèves à écouter.”
Le silence revient pour laisser la parole au prochain.
“On continue dans l’ordre, Hiiragi-san s’il-te-plaît.”
“Oui.”
…
Les élèves passent chacun leurs tours avec plus ou moins d’entrain.
Certains sont motivés, certains ont la flemme, certains sont plus excentriques et d’autres sont tout ce qu’il y a de plus normal…
Jusqu’à arriver au tour de notre chère Rina…
“Suivante, Shimizu-san.”
“Enfin…”